Morgan Valentyne
Vampire | Initié | 1890-1921
« Il dort. Il dort, et moi je suis éveillé. Je n’ai pas d’autre choix que de rester éveillé. Je lui ai fait une promesse. Je dois veiller sur elle, je dois veiller à ce que rien ne lui arrive et je dois la garder dans le secret. Elle ne doit rien savoir de ce que nous savons, parce que nous ne savons rien d’elle. Il ne faudrait pas que nous l’influencions. Je dois l’observer, je dois l’éduquer, je dois la rassurer, alors que je n’en ai aucune envie. Je la haie. Je sais, c’est mal. Elle n’a pas demandé à venir au monde et d’ailleurs, personne ne s’attendait à ce qu’elle voit le jour. Mais elle est là, vestige de leur amour. Je la haie.
Il dort, et moi je suis éveillé. Je n’ai pas pu l’empêcher de s’assoupir. La douleur était trop forte. Il en est devenu complètement fou. Je me suis même demandé s’il ne risquait pas de lui faire du mal, puis je me suis rendu compte qu’il en était incapable. J’aurais préféré qu’il en soit capable. Parce que je n’aurais pas eu à tenir cette promesse. Je n’aurais pas eu à la détester. Il m’a confié ce qu’il avait de plus précieux. Je n’ai pas d’autre choix que de rester éveillé.
Il dort, et moi je suis éveillé. Depuis qu’il m’a choisi, je suis resté loyalement à ses côtés. Je ne m’en sens pas obligé, j’en ai envie. Je pense qu’il a toujours connu mes sentiments à son égard, et je pense qu’il m’aime lui aussi, parce qu’il ne m’a jamais traité comme les autres. Je n’ai jamais connu sa fièvre, ni ses baisers. Jamais. Et pourtant, j’espère encore y avoir droit moi-aussi, mais cela impliquerait qu’il me traite comme les autres, et je ne veux pas qu’il me traite juste comme les autres. Suis-je fou de penser ainsi ?
Il dort, et moi je resterai éveillé, jusqu’à ce qu’il décide de me laisser. J’espère que ce jour n’arrivera jamais, car je sais ce qu’il adviendrait alors de moi. Je ne suis rien sans lui. Je n’ai pas d’autre choix que de rester éveillé. »